Les programmes provinciaux de vaccination des hommes gais, bisexuels et queer (GBQ) contre le virus du papillome humain (VPH) ont prouvé leur efficacité. Toutefois, des lacunes persistent en matière d’accès, entrainant un manque de protection contre les maladies liées au VPH pour de nombreux hommes.
Pour les hommes GBQ — qui présentent un risque plus élevé de contracter des maladies liées au VPH, comme les cancers et les verrues génitales —, la vaccination gratuite se limite aux personnes de moins de 27 ans.
Une nouvelle étude menée à Montréal, Toronto et Vancouver a révélé que 26 % à 35 % des hommes âgés de moins de 27 ans avaient reçu au moins une dose du vaccin. En revanche, le pourcentage d’hommes âgés de plus de 27 ans qui se sont fait vacciner se situe entre 7 % et 26 %. Fait inquiétant, un grand nombre d’hommes ignoraient l’existence du vaccin contre le VPH ou le fait qu’il soit expressément conseillé aux hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes.
« J’ai été surprise de constater le nombre d’hommes qui ne connaissaient pas du tout le vaccin contre le VPH », a déclaré la Dre Ramandip Grewal, qui a mené cette recherche dans le cadre de son doctorat à l’Université de Toronto. Elle a constaté que le cout constituait un obstacle majeur pour les hommes plus âgés, qui ne sont pas éligibles à la vaccination gratuite.
« Trop souvent, nous imputons la responsabilité à l’individu, sans prendre compte des obstacles systémiques à la vaccination », poursuit-elle. « Il faut plutôt collaborer avec la communauté et adapter les interventions pour mieux rejoindre les hommes non vaccinés contre le VPH. »
Au-delà de la question de l’accès à la vaccination, une des façons de cibler les interventions et de réduire les obstacles serait de mettre à profit les services de santé sexuelle existants, notamment les services de dépistage des IST/VIH et d’accès à la PrEP. En combinant la vaccination contre le VPH à ces services, tout en permettant aux hommes de se sentir plus à l’aise de divulguer leur orientation sexuelle lorsqu’ils utilisent les services de soin de santé, on pourrait améliorer le taux de participation.[i]
Ces résultats proviennent de l’étude Engage, menée auprès de près de 2 500 hommes GBQ sexuellement actifs et âgés de 16 ans et plus, dans les villes de Vancouver, Toronto et Montréal.
Fait encourageant, lorsque les chercheurs et chercheuses ont reparlé aux participants de l’étude, un an plus tard, 30 % des hommes non vaccinés admissibles à la vaccination gratuite contre le VPH avaient reçu une dose. Toutefois, seul un faible pourcentage (environ 6 %) des hommes plus âgés, et donc non éligibles à la vaccination gratuite, avaient été vaccinés.
Ensuite, les chercheurs et chercheuses ont analysé les infections anales au VPH chez les jeunes hommes âgés de 30 ans et moins dès leur première visite[ii]. Leur constat : les hommes vaccinés sont moins susceptibles de contracter des types de VPH évitables par les vaccins, que les hommes non vaccinés. En outre, le vaccin s’est avéré plus efficace chez ceux qui ont reçu le vaccin à un jeune âge ou peu de temps après leurs premières relations sexuelles.
« Ces résultats corroborent les directives actuelles en matière de santé publique. Nous recommandons aux hommes qui s’identifient comme gais ou bisexuels de se faire vacciner contre le VPH, de préférence à un jeune âge, avant d’avoir un grand nombre de partenaires sexuels », explique Catharine Chambers, doctorante à l’Université de Toronto, qui a dirigé cette partie de l’étude.
Les hommes GBQ sont plus à risque que la population générale de contracter des maladies associées au VPH, comme un cancer anal ou des verrues. C’est pourquoi les spécialistes en santé publique conseillent aux hommes de se faire vacciner contre le VPH. La plupart des gens contractent au moins une infection au VPH au cours des quelques années suivant le début de leur vie sexuelle. Selon l’âge de la personne au moment de la première dose, deux à trois doses seront nécessaires pour une protection complète.
« Les résultats de recherche comme ceux-ci nous indiquent les meilleures pratiques à adopter pour prévenir les maladies associées au VPH chez les hommes gais et bisexuels », a déclaré la Dre Ann Burchell, professeure agrégée au département de médecine familiale et communautaire de l’Université de Toronto, et chercheuse principale en matière de VPH dans le cadre de l’étude Engage. « Nos études en cours permettront d’approfondir nos connaissances sur l’efficacité des vaccins contre le VPH dans la protection des hommes contre les infections anales ou orales chroniques, et ce, tout au long de leur vie. Une vaccination accessible, conjuguée au dépistage des cancers, représente vraisemblablement notre meilleure chance de prévenir les cancers anaux et buccaux à long terme. »
[i] Grewal R, Deeks SL, Hart TA, et al. La vaccination contre le virus du papillome humain (VPH) dans les trois plus grandes villes canadiennes au moyen d’une cascade de connaissances, de volonté et de participation chez les hommes gais, bisexuels et les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes. Hum Vaccin Immunother. 2 décembre 2021 ; 17 (12):5413-5425. https://doi.org/10.1080/21645515.2021.1979379
[ii] Prévalence du virus du papillome humain anal chez les hommes canadiens gais, bisexuels et les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes en lien avec leur statut vaccinal. Sex Transm Dis. 1 février 2022 ; 49 (2):123-132. doi : 10.1097/OLQ.0000000000001560
Engage
14 novembre 2022